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LE « TRAVAIL » DU CONSEIL EN ORIENTATION - FORMATION

Jean-Marie QUAIREL

12 mai 2014


  • Paradigme d’une anthropologie tripartite ?
  • Processus agissant sur nos inscriptions cérébrales conscientes et
    Inconscientes et sur les représentations qui en découlent ?
  • Fonction d’accompagnement essentielle en Démocratie.

Résumé : Après deux années de retraite, suivant 40 années de pratique du Conseil en Orientation, je me donne pour objectif de revisiter mon expérience et d’en extraire les données essentielles. Celles-ci font apparaître l’importance des enjeux de la fonction du « travail » du conseil en orientation-formation dans la construction et le maintien du lien social en démocratie. Elles déclenchent aussi un double questionnement :
- sur son rôle potentiel dans la plasticité cérébrale et l’organisation de nos représentations mentales.
- sur sa participation d’une conception tripartite de l’anthropologie, qui postule trois dimensions, en étroite synergie : « Corps, Ame, Esprit » ( l’Ame devant se comprendre au sens Jungien de psychisme) .

L’anthropologie étant définie par E.Morin comme « essayant de reconnaître ce qu’il y a de constant, de permanent, de principal dans l’être humain, par rapport aux autres êtres vivants », il me parait désormais évident, que le « travail » du conseil en est une sorte de métaphore, en particulier durant le temps de l’entretien, où il interroge fortement la conception « dualiste » (Le corps et l’âme) qui divise l’être humain au lieux de le réunir.

J’ai choisi de parler de « Travail » du conseil en orientation-formation pour bien souligner, d’une part, ses effets sur le conseiller et sur le sujet, en interaction et, d’autre part, l’exactitude de son champ d’application : Le choix d’une orientation, ne doit pas occulter celui, plus déterminant et signifiant, d’une formation.

Prologue : Dialogue imaginaire avec un ami…..
- Alors, Jean - Marie, comment vis tu cette retraite ?
- Ecoute, mon ami, pour l’instant j’ai l’impression que toutes les activités que j’ai mises en place (Chant, Tai chi, action humanitaire, engagement politique, randonnées etc….) me servent à re-traiter, à recycler mon passé professionnel …Le père Freud avait raison : « Le présent recolore le passé » ….Et puis j’ai retrouvé le temps de lire et j’ai découvert plusieurs auteurs dont les écrits sont venus corroborer des observations que j’avais pu faire dans ma pratique.
- Comment ça ?
- J’y reviendrai plus tard, pour l’instant, laisses moi dérouler le fils de ma pensée.
- Je te reconnais bien là ! Pas trop de théorie !
- Pas tout de suite en tous cas ….Vois tu, bizarrement, toutes les expériences que je vis depuis deux ans, convergent vers un point central qui me semble être la fonction du « travail » du conseil, particulièrement dans le temps si particulier de l’entretien. Je sais que cette impression risque de se dissiper avec le temps et je ne veux pas la laisser perdre. J’ai envie d’en laisser une trace …..Après, les gens qui me liront en feront ce qu’ils voudront.
- Attention de ne pas trop délirer !
- J’ai la sensation que c’est un bon délire et qu’il ne peut pas faire de mal à mes futurs lecteurs ….De toutes façons , ce que je vais te dire , s’impose à moi …Un peu comme si un « autre moi-même » dictait mon écriture ….
- Bon, ça ne s’arrange pas ! Je t’écoute ….mais c’est vraiment parce que je t’aime bien.

Une absence révélatrice :

- Tu sais ce qui me manque le plus ? C’est la présence globale des gens , dans toute leur singularité : des voix , des regards , des expressions du visage , des positions du corps , des échanges d’ énergies en somme et puis , en second lieu , leurs pensées et leurs mots pour les dire .
- Ça je peux le comprendre : Tu t’en es enrichi en quelque sorte ?
- J’ai grandi avec oui …J’ai la sensation d’être comme un apiculteur qui recueille le miel de ses abeilles …
- Que veux tu dire ?
- Mais c’est évident ! C’est un miel « toutes fleurs » qui résulte du travail des dizaines de milliers de personnes, jeunes ou adultes, de tous niveaux et de toutes cultures, qui se sont coltiné la construction de leur présent et de leur avenir …Je suis riche de tous les pollens qu’elles ont déposés dans ma conscience, pour faire sens et pour faire démocratie et humanité.
…Evidemment, là où on le récolte le mieux, c’est dans les ruches que sont les C.I.O. , et je ne comprend pas que , depuis 30 ans , nos politiques s’ingénient à dénier l’importance de la fonction de conseil en formation initiale et continue ….Ou plutôt , j’ai peur de trop bien le comprendre, compte tenu du potentiel émancipateur du « travail du conseil » quand il est conduit suivant certaines valeurs et règles éthiques …Si les moyens n’ont pas été donnés pour développer cette approche dans le cadre du service public , c’est , peut être , que la volonté de réussir l’émancipation du plus grand nombre n’existait pas vraiment .Je regrette aussi que les conseillers aient, peu à peu, déserté le C.I.O. au bénéfice des établissements , au risque , avéré aujourd’hui , de diluer leur cœur de métier (le Conseil) dans des approches psychopédagogiques contestables, ayant pour résultat essentiel de conforter, globalement, le fonctionnement élitiste du système éducatif…

- C’est bizarre, j’ai l’impression que tu devrais aller consulter et, en même temps j’ai envie de connaître la suite …
- Eh bien, c’est parfait ….Mais je vais le faire par écrit …Je vais essayer de faire partager le questionnement qui m’a envahi pendant ces deux années de retraite. J’ai bien conscience qu’il est sans doute question, pour moi , d’enjoliver mon passé professionnel , pour pouvoir en faire le deuil . Je pense toutefois que mes réflexions peuvent servir à celles et ceux qui voudront bien les méditer, en se référant à leur propre expérience et qui s’interrogent sur ce qu’est le Conseil en orientation et sur ce qu’il n’est pas.
Nous nous reverrons quand tu auras pris connaissance de l’ensemble de mon texte, si tu veux bien.

Des lectures éclairantes et nourricières, dans « l’après » de ma pratique et qui vont étayer mon propos :
« La drachme perdue » (Michel Fromaget)
« Philosophie du vivre » (François Jullien)
« La science de l’intention » (Lyne Mac Taggart)
« La matrice énergétique » (Richard Bartlett)
« Comprendre et pratiquer l’approche narrative » (PB Shanoun et Béatrice Dameron)
« L’Erreur de Descartes » (Antonio Damasio)
« L’autre moi-même » (Antonio Damasio)
« L’age de l’empathie » (Frans de Waal)
« Sur les épaules de Darwin » (JC Amesen)
« Mener sa vie : la voie de l’individu attentionné » (Antoine Valabrègue)
« La nature et la règle » (JP Changeux et P Ricœur )
« A chacun son cerveau : Plasticité neuronale et inconscient » (P.Magistretti et F.Ansermet)

  1/Les sources des ingrédients du « travail » du conseil :

J’ai choisi de m’appuyer sur plusieurs citations et de vous les livrer, groupées en séquences, afin de créer un effet de sens :

  • Première séquence :
    L’apparition des processus mentaux dans l’évolution, autrement dit l’apparition de représentations pouvant être rendues conscientes en tant qu’images, a donné aux organismes une nouvelle façon de s’adapter aux circonstances rencontrées dans l’environnement, qui n’ont pas pu être programmé dans le génome……..Les images sont probablement les matériaux principaux à l’origine des processus de pensée, quelle que soit la modalité sensorielle au sein de laquelle elles sont engendrées, et qu’elles concernent des choses ou des processus impliquant des chose ; ou bien qu’elles concernent des mots ou d’autres symboles d’un langage donné, se rapportant à des choses ou des processus.
    (Antonio Damasio)

La plasticité (du cerveau) participe à l’émergence de l’individualité du sujet. Chacune de nos expériences est unique et a un impact unique……En même temps qu’elle opère une sorte de détermination du sujet, elle l’affranchit du déterminisme génétique
 (F.Ansermet et P. Magistretti)

L’homme est le fruit de sa pensée….Ce que les hommes pensent, ils le deviennent
 (Upanishads . Inde)

Les symboles ont pour fonction de réunir le monde de l’âme et celui de l’esprit…Le mot symbole vient du grec « scemballein » qui signifie « réunir »
(Michel Fromaget) .

Penser, par quoi la vie, aux yeux des grecs, se qualifie c’est faire émerger de la présence ; C’est maintenir devant l’esprit, abolir l’absence
 (F. Jullien)

Une civilisation n’est forte, à l’instar de l’individu, qu’à hauteur du différé qu’elle peut supporter
 (F.Jullien)

 Ne pas biaiser avec le présent rencontré, en même temps que le laisser fructifier ….Tenir à la fois les deux : Répondre à l’instance du présent, cet instant qui passe s’entendant comme une exigence rejetant la répétition-conservation
 (F.Jullien)

Vous ne pouvez pas accomplir une même chose de la même manière et en attendre un résultat différent
 (A.Einstein)

Il y a, me semble t-il, dans cette première séquence, de quoi méditer sur notre système d’éducation et de formation et sur les dérives d’une immédiateté sans contrôle, à la lumière des perspectives inconnues, ouvertes par les récentes découvertes sur la plasticité cérébrale, qui viennent valider des sagesses ancestrales.

  • Deuxième séquence :

Des recherches récentes (physique quantique) démontrent que les êtres vivants transmettent et reçoivent en permanence une énergie mesurable
 (L.MC.Taggart)

Un être humain fait partie d’un tout que nous appelons « univers » : Il demeure limité dans l’espace et le temps. Il fait l’expérience de son être, de ses pensées et de ses sensations, comme s’il était séparé du reste : Une sorte d’illusion de la conscience
 (A.Einstein)

Gary Schwartz a établi la preuve que les humains sont, à la fois, des récepteurs et des transmetteurs de signaux quantiques ….Une intention dirigée, semble se manifester sous la forme d’une énergie électromagnétique et engendrer un flux ordonné de photons, pouvant être vus et mesurés par un équipement suffisamment sensible
 (L.MC.Taggart)

La pensée produit les mêmes instructions mentales que l’action elle-même
 (L.MC.Taggart)

Tant la science moderne, que les anciennes pratiques spirituelles, peuvent nous enseigner comment utiliser notre extraordinaire pouvoir de transmissions d’intentions …..Si nous parvenons à apprendre comment diriger positivement le pouvoir que nous avons d’influencer les choses, nous pourrons améliorer chaque aspect de notre mond
e (L.MC.Taggart).

Nous ne sommes, en essence, que des structures de lumière et d’informations
(R.Bartlett)

Pourquoi un électron se comporte t-il comme une particule lorsqu’il est observé, mais affecte la forme d’une onde dés que vous le considérez sous un autre angle, ou que vous cessez de l’observer ? C’est le « collapse du Psy. : l’effet induit par l’observateur
 (R. Barteltt) .

La notion de contenu psychique est ……un construit par rapport à l’expérience d’être dirigé vers le monde et donc d’être hors de soi dans l’intentionnalité ….Je n’accepte pas du tout la conception qui fait de « l’Esprit » un contenant avec des contenus …..L’intentionnalité introduit la notion de visée transcendante ; Je ne prends pas le mot « transcendant » au sens religieux du terme, je dis simplement que je suis hors de moi quand je vois, c’est-à-dire que voir, c’est être mis en face de quelque chose qui n’est pas moi , c’est donc participer à un monde extérieur …Je dirais donc que la conscience n’est pas un lieu fermé , dont je me demanderais comment quelque chose y entre du dehors , parce qu ‘elle est , dès toujours , hors d’elle-même
 ( Paul Ricœur)

…Il y a complémentarité entre la réflexion du Philosophe et les tentatives de formalisation de la neurobiologie théorique ….La pierre de touche demeure l’intentionnalité, et la question posée : Peut on « naturaliser » l’intentionnalité ? La réponse …semble positive …Nous comprenons ensemble l’intentionnalité comme le niveau de représentation le plus élevé , celui qui oriente les conduites humaines , définit les plans d’actions , les projets , la conception du monde
 ( JP Changeux)

Cette séquence pour démontrer la réalité de l’existence du champ énergétique global qui réunit tous les êtres vivants et la force de l’intention dans les interactions humaines : un lien direct avec les enjeux et les fondements « du travail » du conseil peut être ainsi établi, selon une probabilité élevée, confortée par la pratique.

  • Troisième séquence :

Ce que nous appelons notre conscience du présent, est une oscillation permanente entre mémoire et anticipation, entre souvenirs et désirs, entre nostalgie et attente …En fonction de nos souvenirs, de nos émotions, de nos espoirs et de nos craintes, en fonction de ce que nous avons déchiffré et compris du passé et de ce que nous imaginons de l’avenir
 (JC Ameisen) .

Notre cerveau a, non seulement, la capacité, en fonction des expériences que nous vivons, de reconfigurer durant toute notre existence, les réseaux de connexions entre les cellules nerveuses qui sous-tendent notre mémoire et nos activités mentales…Il a aussi la capacité de renouveler une partie des cellules nerveuses qui le composent….Il y a 15 ans, nous avions la certitude que notre cerveau était incapable de se renouveler
 (JC Ameisen)

Puisque le cerveau est le public obligé du corps, la perception des émotions l’emporte sur les autres processus perceptifs ; Et, puisqu’elle se développe en premier, elle constitue un cadre de référence pour ce qui se développe ensuite et, par là, elle intervient dans tout ce qui se passe dans le cerveau, notamment dans le domaine des processus cognitifs
( Antonio Damasio)

Un marqueur somatique …..oblige à faire attention au résultat néfaste que peut entraîner une action donnée, et fonctionne comme un signal d’alarme automatique qui dit : attention il y a danger à choisir l’option qui conduit à ce résultat …..Les marqueurs somatiques sont donc acquis par le biais de l’expérience individuelle, sous l’égide d’un système d’homéostasie interne et sous l’influence d’un ensemble de circonstances externes qui comprennent , non seulement les entités et les événements avec lesquels l’organisme interagit , mais aussi les conventions sociales et les règles éthiques
 (Antonio Damasio)

…. Etre fait « des aléas et des glissements successifs de nos apprentissages » (Françoise Héritier) et vibrer au rythme des émotions qui impriment en nous des expériences nouvelles
(JC Ameisen)

 ….A quel point est profondément encré en nous le lien qui nous rattache aux autres et à quel point serait étrange l’idée d’un « Je » qui existerait en l’absence d’un « nous » …
 (Giacomo Rizzolati)

Au lieu que l’empathie soit un point d’arrivée (au cour de l’évolution) elle a probablement été le point de départ de l’émergence du langage et de la culture dans notre espèce …L’empathie est la forme originelle, pré linguistique du lien interindividuel, qui n’est entré que secondairement sous l’influence du langage et de la culture
 (Frans de Waal)

Cette troisième séquence pour souligner l’importance des émotions dans la construction de soi, le caractère déterminant des « marqueurs somatiques » et l’aspect fondamental de l’empathie « point de départ de l’émergence du langage … » Ces trois données devraient servir à revisiter beaucoup de certitudes en matière d’éducation et en Psychologie ….Elles renforcent mes convictions sur le caractère essentiel du « travail » du conseil , pour faciliter, alimenter et structurer les synergies entre ces trois registres.

  • Quatrième et dernière séquence :

« Notons l’importance du temps de « l’entre-tien » : C’est-à-dire, où l’on tient à l’entre, où l’on tient de l’entre, où l’on sait que c’est dans l’entre des démarcations que se discerne de la capacité, que se développe de l’effectif….c’est dans l’aptitude à « ouvrir de l’entre » que se déploie la vie » (François Jullien)

« La Psychologie populaire, s’intéresse aux personnes, comme vivant leur vie en fonction de certaines intentions et objectifs, dans la recherche de ce qui est important pour elles » ( P.Blanc Sahnoun dans « L’approche narrative »)

« Les Humains donnent un sens à leurs expériences vécues, en les plaçant dans des cadres qui les rendent logiques et intelligibles » ( approche narrative)

« Dans le contexte des psychologies des « états internes » l’expression humaine est appréhendée comme une manifestation superficielle d’une autre essence, ou de forces….qui résident au cœur de l’identité, ou d’une distorsion, ou d’une perturbation, d’un déséquilibre entre ces forces. Dans le contexte de difficulté intervenant dans la vie des individus , ces expressions sont toujours considérées comme étant des signes d’une pathologie , d’un déficit, ou d’un dysfonctionnement ….A l’inverse , les états intentionnels de la Psychologie populaire , sont radicalement ouverts à une sorte de « renégociations » , qui a le pouvoir d’éclairer les expressions humaines de vie , à travers une multiplication de facettes distinctes….débouchant sur des options pour l’adoption « d’intentions alternatives » qui n’avaient pas été envisagé auparavant , afin de restaurer de précieuses compréhensions » (PB Sahnoun)

« Plutôt que de contribuer au genre de conclusions relatives aux états internes , qui peuvent isoler les gens les un des autres , « les conversations externalisantes » ( narrations) contribuent au développement de conclusions identitaires alternatives, qui donnent aux individus le sentiment que leurs vies sont reliées à celles d’autrui ( appartenance) sur le fondement de thèmes partagés, caractérisés par une variété d’objectifs, de valeurs, de croyances , d’espoirs , de rêves, de visions , d’engagements » ( PB Sahnoun)

« Un lien étroit existe entre les structures narratives et la capacité fantastique dont les individus disposent dans leur engagement réflexif avec la vie » (PB Shanoun)

Sans partager la totalité des analyses de cette quatrième séquence , je dois dire qu’elle correspond, pour l’essentiel, à ce que j’ai appris du « travail » du conseil , surtout quand il est conduit en groupe , et qu’elle confirme les limites des approches traditionnelles de la psychologie en éducation et de son caractère trop souvent clivant pour les individus : Nous nous élevons contre l’individualisme ambiant, sans regarder en face que nous participons aux fonctionnement des systèmes qui le génèrent .

J’ai voulu vous faire partager cet ensemble de citations afin que vous ressentiez en quoi elles apportent force et cohérence à la notion de « travail » du conseil . Celui-ci a été dénié et négligé par nos dirigeants, en formation initiale et continue et pas assez soutenu par nous-mêmes. Aujourd’hui, la notion de « conseil » se banalise et se marchandise en étant détournée des effets qui découlent d’un véritable « travail » : Emancipateur, structurant et fédérateur.

 2/ Les principes fondateurs d’un « travail » du conseil : Paradigme d’une anthropologie tripartite ?

Ils ne peuvent prendre sens, que dans la mesure où il s’inscrivent dans un cadre qui fait sien l’ensemble des références que j’ai essayé de mettre en avant dans les quatre séquences précédentes. Références toutes articulées à une conception « Corps, Ame, Esprit » de l’être humain, à l’évidente synergie de ces dimensions, entre elles et avec un environnement.

Quelles que soient la singularité et la diversité des interactions humaines qui ont jalonné mes 40 années de pratique du conseil en orientation-formation, ils s’en dégage quelques principes invariants et permanents :

Une finalité, commune à celles et ceux qui cherchent à « s’orienter » , à trouver leur place dans un monde incertain : La recherche du « pouvoir d’agir dans sa vie » ; Evidente chez certains , plus dissimulée ou empêchée chez d’autres , cette quête était partagée par l’immense majorité de celles et ceux que j’ai rencontrés . La forme de leur recherche pouvait différer (expansivité/intériorité ; violence/silence etc…) mais le fond restait le même. Je pense que cette aspiration est éternelle et qu’elle est une réponse au tragique de la condition humaine dont l’issue n’épargne personne. L’illusion de l’homme, entretenue par certaines formes d’organisations économiques et sociales, est de croire qu’il peut y arriver seul. Tout l’intérêt du « travail » du conseil , à l’instar de toute les formes de travail réflexif sur soi, est de lui faire éprouver (sentir et comprendre) qu’il ne peut pas « agir dans sa vie » en ignorant les autres : apprendre à passer de l’envie « d’avoir un pouvoir sur…. » au désir « d’acquérir le pouvoir de …. » (Antoine Valabrègue).

« Sentir et comprendre » sont les deux registres indissociables et indispensables du « travail » du conseil ; L’échec ou l’inutilité de mes actions dans ce domaine, spécialement dans le temps de l’entretien, ont toujours été les conséquences d’un excès d’intellectualisation ou de rationalisation coupé de mes émotions, ou bien d’un trop plein de sensations sans distance, ni recul. C’est l’équilibre entre l’émotionnel, le ressenti et le rationnel, la réflexion, qui produit une pensée juste, mais jamais un changement d’attitude ne peut se produire chez un individu, sans une mobilisation de ses émotions.

Ce que m’a appris le « travail » du conseil, quand il est abouti, c’est la dimension spirituelle de l’être humain, qui surgit, inéluctablement, quand il a pu contacter, au plus profond de lui-même, une sensation, puis un sentiment de liberté, qui l’affranchit des fausses contraintes : Le spirituel, différent du psychisme, apparaît lorsque celui-ci est relié aux sensations et lorsque l’énergie circule sans entrave dans l’ensemble des méridiens du corps et vient irriguer la pensée. Durant le travail du conseil , en particulier dans l’entretien , ce surgissement peut se mesurer à l’observation de plusieurs paramètres ( lien avec la notion de « marqueurs somatiques » selon A.Damasio) : Inflexions des vibrations de la voix, soudain plus affirmée , brillance nouvelle du regard , sourire imperceptible , coloration particulière de la peau du visage , redressement de la posture devenue plus verticale , relâchement des épaules , respiration mieux investie , bâillements de décontraction , ….et capacité à énoncer clairement , avec précision et fermeté , ce qui a été senti et compris durant le travail en interaction avec le conseiller . A contrario, l’échec du processus de conseil, c’est-à-dire l’absence du « travail », peut se mesurer à l’observation de caractéristiques inverses pour l’ensemble de ces paramètres. Il résulte souvent d’une application aveugle du dualisme cartésien et de ses prolongements éducatifs (intellectuel/manuel).

Les Conseillers d’orientation psychologues devraient consacrer le temps nécessaire à échanger sur ces dimensions de leur pratique et à s’y former : Je suis, pour ma part, convaincu, qu’un véritable « travail » du conseil ne peut se réaliser, si on les ignore, ou si l’on en dispose pas d’emblé

 3 / Le « Travail » du conseil : Une action génératrice de conditions favorables à la plasticité du cerveau ?

Dans « l’Erreur de Descartes », Antonio Damasio écrit : « Il semble bien y avoir, dans le cerveau humain, une série de systèmes neuraux impliqués de façon étroite dans les processus de pensée orientés vers un but, que nous appelons raisonnement, ainsi que dans l’organisation des réponses que nous appelons prises de décision, l’accent étant mis dans ces deux cas sur le domaine personnel et celui des relations sociales . Cette même série de systèmes est aussi impliquée dans les processus présidant à l’expression et à la perception des émotions, et se rapporte en partie au traitement des messages provenant du corps ».

Je fais l’hypothèse que l’action du « travail » du conseil , en tant qu’expérience , procède de ce principe et qu’il peut « laisser des traces » dans le réseau neuronal, au même titre que la Psychanalyse , comme tendent à le montrer des études récentes : « La plasticité du cerveau démontre que le réseau neuronal est , en permanence , ouvert au changement , à la contingence , modulable par ces événements , par les potentialités de l’expérience , qui peuvent modifier ce qui était » ( François Ansermet , Analyste , dans une conférence , co auteur , avec Pierre Magistretti , biologiste, de « A chacun son cerveau : Plasticité neuronale et inconscient » )

Ainsi, pendant le temps de l’entretien de conseil, va s’opérer, souvent à l’insu d’une pleine conscience du sujet, mais aussi du conseiller, un travail souterrain de pollinisation et de fertilisation croisée. Celles et ceux d’entre nous qui avons pratiqué le « tenir conseil » d’Alexandre Lhottelier, ou l’approche « d’auto-supervision » de Conrad Lecomte, ou encore « l’entretien d’explicitation » de Pierre Vermesh, l’auront certainement éprouvé, tout autant que celles et ceux qui ont exploré le Yoga, le Tai Chi ou les thérapies analytiques et corporelles. Je vais essayer d’apporter ma pierre à l’édifice, en amenant des éléments de compréhension complémentaires à propos de ce qui s’y joue. Auparavant, je veux souligner, que j’ai connu de nombreux pairs qui n’avaient pas eu besoin de passer par les chemins que je signale plus haut et qui étaient de remarquables conseillers, plébiscités par les usagers.

Le « travail » du conseil ne peut pas se réaliser sans un temps d’entretien : C’est alors que s’opère tout un travail global de la personne, qui débouchera, souvent hors entretien, sur une indication, qu’elle pourra se donner à elle-même, ou qu’elle sera en mesure d’entendre du conseiller ; C’est à travers l’observation de changements d’attitudes du sujet, souvent mineurs, mais déterminants dans son adaptation, que l’on pourra vérifier les effets du travail réalisé. Ecoutons Michel Fromaget : « Rien de mes états de conscience, ne peut se communiquer au monde et s’inscrire en lui, sans passer par mon corps ; A l’inverse, aucune action, aucune information venant du monde, ne peut atteindre mon âme (mon psychisme pour cet auteur, à l’instar de Jung) sans passer par le corps : C’est par lui que l’âme se donne à voir et à aimer »
Ainsi, l’entretien de conseil en orientation-formation est il un véritable « creuset magique », où va se réaliser une alchimie particulière, un travail de conciliation, une métabolisation des divers composants d’énergies qui fondent et constituent le sujet dans son rapport à la vie, aux autres et au monde.
Il faut ici souligner l’importance des moments de questionnement et d’évocation , où un « travail » essentiel s’opère , souvent dans un silence qu’il faut savoir respecter : En effet , ces moments sont probablement ceux où l’individu va pouvoir mobiliser l’ensemble des instances qui le constituent ( émotions , sensations corporelles , réflexions , souvenirs , liens sociaux etc..) en travaillant à partir de ses représentations : La capacité de mise en évocation, du passé comme du présent, permet l’anticipation et donc l’élaboration de projet, par lequel se caractérise l’Etre humain . En cela, le « travail » du conseil est une expérience fondatrice, qui , lorsqu’elle complète d’autres expériences dans la vie réelles, devient un puissant adjuvant qui facilite énormément l’adaptation au réel. Il ne faut pas chercher ailleurs que dans le déficit d’expériences fondatrices, généré par le fonctionnement de notre système éducatif et socio économique , et par le manque de « travail » du conseil , contribuant à créer des repères internes, l’explication de la déshérence d’une grande partie de la jeunesse :Si ce temps est négligé, ou s’il obéit à des objectifs extérieurs à la réalisation pleine et entière du sujet (besoins à court terme de l’économie par ex.), le « travail » du conseil ne peut se faire, et toutes les gesticulations autour de l’orientation, s’apparentent alors à de veines tentatives d’informations dirigées et d’influences, qui débouchent inéluctablement sur le décrochage de celles et ceux à qui elles s’adressent : Du bavardage superficiel, qui n’est pas écouté .

Enfin, le « travail » du conseil est fortement dépendant des conditions institutionnelles où il est mis en œuvre : Procédures d’orientation en particulier, mais aussi projet d’établissement et inter action de la formation et de l’organisation économique et sociale locale ; Si les intentions qui organisent leur fonctionnement , ne convergent pas vers la recherche de la pleine réalisation de chaque individu tout au long de sa vie , si elles s’opposent au lieu de se compléter , si elles « font conflits » au lieux de « faire sens » , si elles érigent la méfiance et la comparaison en modèle , alors elles sont toxiques pour le « travail » du conseil : Celui-ci participe d’une « écologie de la pensée » concernant les rapports de l’homme à sa formation et au travail et cet « écosystème social » est extrêmement sensible aux pollutions mentales qui privilégient « l’avoir » et négligent « l’être » . ….Tout comme l’écosystème des abeilles, aujourd’hui menacé .

 4/ Treize éléments constitutifs du « Travail » du Conseil 

Cette liste ne prétend pas à l’exhaustivité : Elle synthétise mon expérience.

  1. L’intention : Conditionne forcément nos actions et peut les colorer positivement ou négativement.
  2. L’attention : Commencer à s’intéresser vraiment à l’autre pour lui être attentif.
  3. La réceptivité : Calmer notre mental pour être en état de vacuité et apte à recevoir les multiples signifiants de l’autre.
  4. La réflexivité : Etre en capacité de penser sur ses propres actions ou paroles.
  5. La circulation d’énergie : Sa liberté conditionnera, de toutes façons, la qualité de l’attention et de la compréhension du sujet et du conseiller.
  6. La bienveillance engagée : Ne pas s’effacer en tant que sujet. Dans certaines circonstances, la neutralité bienveillante peut s’apparenter à de l’indifférence.
  7. Les liens libérateurs : Réunir l’émotionnel et le conceptuel, permet souvent une libération vis-à-vis de fausses contraintes et une sortie des conduites d’échecs répétitives.
  8. L’imaginaire accompagné : Il faut travailler avec les rêves et avec l’imaginaire, réservoirs d’énergie créatrice.
  9. La conscience de soi et du réel : Etre en mesure de regarder les effets des actes qu’on pose et aussi de « voir ce qui est ».
  10. La puissance de l’interaction : C’est la clef d’accès à tous les éléments constitutifs du « travail » du conseil.
  11. L’empathie inconditionnelle : Générée par l’interaction, elle est une nécessité, indissociable de la vie même et « probablement préexistante au langage » (Frans de Waal).
  12. L’écoute vigilante : Complément indispensable de l’empathie inconditionnelle, dans la mesure où elle doit permettre d’éviter la démagogie et de distinguer les valeurs et croyances à l’œuvre chez un individu.
  13. Le respect des silences : C’est un temps où se déroulent souvent des actions « d’évocation », essentielles au « travail » du conseil.

Un accompagnement émancipateur et structurant devrait être le résultat de la mise en œuvre de l’ensemble de ces éléments, caractéristiques du « travail » qui s’opère, à la fois chez le sujet et chez le conseiller, dans le temps d’un processus de conseil en orientation-formation.

 5/ Une fonction d’accompagnement, essentielle en Démocratie :

La fonction de conseil n’est pas nouvelle, même si elle est finalement récente dans le système éducatif (Conseil national de la résistance ) . Elle a existé dans des civilisations très anciennes et subsiste dans certaines sociétés traditionnelles, sous des formes variées ( Forum, Agora, arbre à palabres , chamanisme etc…) Nous savons que les princes et les puissants s’en sont toujours entourés , souvent pour asservir leurs peuples ou pour servir leurs seuls intérêts …Nous savons aussi comment certains régimes politiques , ou certaines « églises » , ont crus pouvoir réduire cette fonction à l’application d’une idéologie unique et finalement mortifère . La fonction de conseil et le « travail » qu’elle induit, sont donc des conquêtes démocratiques et progressistes, dans la mesure où elles sont mises au service de l’ensemble des citoyens. En ce sens, on peut dire qu’elles ont une dimension « subversive », dérangeante dans les systèmes trop contraints et convenus, qui se caractérisent souvent par un déni des ressentis individuels ou par un interdit de leurs expressions. Le « travail » du conseil est un antidote puissant à la « forclusion » des émotions et des sentiments et donc de la pensée, qui engendre la perte de sens et l’égarement mental et physique, responsable de la peur et de la « sidération » de trop de personnes.
Nous vivons une société où la sélection des meilleurs par exclusion des plus fragiles, la précarisation des actifs, le déni de leur expérience au travail et l’oubli de celles des anciens, sont devenues des règles. Dans une forme d’organisation sociétale, construite sur des règles inverses (Emancipation de tous, attention, sécurité, confiance, reconnaissance, valorisation), le « travail » du conseil peut être, en partie, assuré par les adultes, acteurs reconnus du fonctionnement du système. Alors, il a un sens très fort, incarné et le recours à un conseiller, quand il est nécessaire (un choix de formation par ex.), procède d’une démarche volontaire, naturelle et non contrainte
Aujourd’hui, la question est bien de savoir si nous voulons aller vers un individualisme débridé et une société des « ego », où si nous croyons encore possible l’émancipation de chaque individu dans le cadre d’un projet collectif laïque. Le développement du « coaching », qui vise à la recherche de la performance dans tous les domaines, est une réponse « égotique », humainement limitée. Le réserver, de fait, à une élite économique et culturelle et le laisser se développer à partir des angoisses et de la fragilisation de la population, générés par le fonctionnement même du système, est un recul démocratique majeur.
Le « travail » du conseil , à l’usage du plus grand nombre possible de citoyens, décliné au niveau local dans le cadre d’un service public, serait une réponse démocratique, émancipatrice et fédératrice. Aujourd’hui, la Démocratie représentative a atteint ses limites et doit s’enrichir d’une organisation sociale beaucoup plus aboutie en terme de participation citoyenne. Le « travail » du conseil est une notion transversale à de nombreux domaines de la vie publique et permet à chaque citoyen de contribuer à l’intérêt général en lui facilitant l’expression de son expérience. La création d’un « service public d’information et de conseil tout au long de la vie » aurait le mérite d’énoncer une intention beaucoup plus claire et moins ambiguë, que celle d’orientation. A ses cotés, il y a la place pour des « AGORA des Métiers et des Cultures », cogérées par l’ensemble des acteurs publics et privés d’un territoire et dont la finalité serait de :
- Faciliter les liens inter génération et la transmission des savoirs faire et savoirs être professionnels.
Faire évoluer les pratiques professionnelles et les conditions de travail, en tenant compte de l’expérience de chacun (Clinique de l’activité : Travail prescrit/ Travail réel . J.Y.Rochex)
Mettre en valeurs les différentes formes de cultures, professionnelles, populaires, religieuses, ethniques, qui « font société ».

Tout appel à la cohésion sociale est une illusion, voire un non sens violent, si l’état, ou son échelon régional, abandonne au secteur privé, au-delà de ses missions régaliennes, des champs entiers de principes d’organisation et de fonctionnement publics, indispensables au « vivre ensemble » : le champ du Conseil en orientation-formation en fait partie. On aura compris que le « travail » du conseil , s’il se cristallise souvent dans le temps de l’entretien, a besoin de tout un ensemble d’interactions sociales, dans une organisation publique qui facilite son activation.

Conclusion :
Combien de temps encore, allons nous nous épuiser et user nos énergies dans une confrontation teintée de « lutte des classes » et des oppositions stériles, dont les puissants sortent toujours vainqueurs ? Quels bénéfices secondaires avons-nous à maintenir ce système ? Qu’évitons nous ainsi de rencontrer, des conséquences d’un « pouvoir de conduire sa vie » reconnu à chaque individu et applicable dans le cadre d’un projet collectif dirigé par l’intention du « Chacun, pour et avec tous » ?
Les temps sont venus de mettre en œuvre des formes nouvelles d’organisation sociale qui permettent, effectivement, à chaque citoyen, d’éprouver un sentiment d’appartenance à la communauté des humains, grâce à la reconnaissance de ses différences, de son expérience, de ses limites et de ses compétences. Celles-ci permettraient peut être de se rapprocher de l’idéal fondateur de le République : « Les hommes naissent libres et égaux en droit ….Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l’utilité commune », sachant que les besoins de la société ne devraient être que la traduction des besoins individuels.

En réunissant mes souvenirs d’expériences, quelques connaissances et mes « intentions d’avenir », j’espère avoir pu montrer en quoi le « travail » du conseil est une réalité et comment il peut, à son niveau, contribuer à une alternative humaniste, opposée à la dérive ultra libérale totalitaire que nous subissons depuis de trop longues années. Les utopies n’existent que pour celles et ceux qui ne veulent rien changer à leur organisation mentale égotique et craintive et à sa projection dans un monde, devenu à leur image. L’observation des milliers d’initiatives locales alternatives, émancipatrices , justes et responsables , dans tous les domaines où il est question du rapport des êtres humains à l’ensemble de leur vie, montre qu’un autre monde est possible, et que sa construction est en marche .

Avignon le 9/09/2013

Jean marie Quairel

Conseiller d’orientation Psychologue et
Directeur de CIO Honoraire.

Epilogue : 27/09/2013 : Au soir de la dernière journée du Congrès international de « l’AIOSP » ( Association internationale de l’orientation scolaire et professionnelle) de Montpellier , je retrouve mon ami imaginaire :
Bonsoir Jean Marie, j’ai lu ton texte : Il m’a surpris et un peu déconcerté ….Il est intéressant, mais très subjectif et sans validation scientifique reconnue ….Tu auras du mal à avoir une reconnaissance Universitaire !
Ce n’est pas mon souci ; Si mon texte arrive à « parler » à celles et ceux qui le liront, il aura rempli sa fonction et encore plus s’il fait débat dans les CIO, ! Si, en plus, il peut intéresser certains chercheurs, tant mieux.
A propos, tu dois être satisfait ? Dans plusieurs ateliers, la notion de « spiritualité » est ressortie et tu en fais une composante essentielle du « travail » du conseil ….
Bien sur, c’est notamment le cas de tous les courants qui s’inspirent de l’approche Canadienne (Québécoise plus précisément), mais elle est aussi contestée par d’autres, aussi nombreux ….Le synchronisme de ma conviction et de certaines pistes de recherches théoriques, prouve simplement que la réflexivité consciente sur une pratique peut être un puissant outil de découverte.
Pourtant, rien ne peut remplacer la rigueur scientifique, la rationalité d’un plan d’expérience bien construit !
Je ne le conteste pas …Je m’interroge simplement sur la difficulté de la diffusion des découvertes de la Psychologie dans le champ de la formation …Il ne suffit pas de se référer à des « théories impeccables », encore faut il les traduire dans les pratiques ; Personnellement, j’ai choisi une approche plus inductive et plus réflexive et j’ai observé ses effets .
Tu t’es éloigné de la Psychologie classique et de ses différentes composantes Universitaires ?
Je pense que c’est elle qui s’est éloignée de la vie des gens …..Mais n’entamons pas ce débat maintenant …..J’ai observé que le congrès de Montpellier, remarquablement organisé, mettait en lumière une sorte de « Controverse », un peu à l’image de celle de Valladolid en 1550qui s’interrogeait pour savoir : « La manière dont devraient se faire les conquêtes dans le nouveaux Monde….pour qu’elles se fassent avec justice et en sécurité de Conscience », ou, de manière plus romanesque, si les Indiens avaient une âme ?.
Tout de même, notre débat n’était pas à ce niveau !
Bien sur que si ! Quand on s’interroge, sur la question de savoir si notre fonction est d’aider les individus à s’orienter, ou si elle est de les orienter , et que l’on arrive pas à trancher ,le débat est bien du même ordre et c’est bien un « nouveau monde » que nous abordons !
C’est une vraie question, très complexe !
C’est surtout une question que certains s’évertuent à complexifier, à mon sens, pour ne pas concéder un pouce de leur pouvoir ! C’est aussi une question qui met en évidence la nécessité, pour la profession, de se doter d’un codicille éthique spécifique, à ajouter au code de déontologie des Psychologues ….Mais, il se fait tard et je te propose de nous revoir d’ici quelques semaines, pour débattre de « la Controverse de Montpellier » ! Avant de nous quitter, je voudrais simplement livrer à ton questionnement, deux moments du congrès que j’ai trouvé emblématiques : A quelles sources, à quels courants, doivent se nourrir les Conseillers d’Orientation Psychologues ? Celles qui se référent aux certitudes rationnelles et aux exigences élitistes de « ceux qui savent ce qui est bon pour les autres », symbolisées par le discours d’un éminent juriste, au demeurant sympathique, Doyen de l’Université, qui nommera les conseillers , avec insistance , « Orientateurs » ?…..Ou celles transmisses par la lumineuse démonstration des jeunes danseuses ( plus Un !) en lien avec une vidéo pleine du sens des métiers , démonstration chargée de toute l’énergie , la créativité , l’engagement d’une jeunesse qui attend qu’on lui fasse confiance et que des « adultes guetteurs » l’accompagnent, avec bienveillance et vigilance , dans un monde « liquide » (Jean Guichard) et incertain ? J’en suis désormais convaincu : L’organisation et le fonctionnement du monde ne sont pas des réalités immuables ; Elles ne sont que le fruit de nos pensées.

Bonsoir ami …..Prend bien soin de toi et de tes proches.


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